Réforme des collectivités : ce que veulent les sénateurs

Publié le par Association Grand Paris

PRESSE
LA GAZETTE Décentralisation - 18/06/2009

Réforme des collectivités : ce que veulent les sénateurs

Analyse et interviews vidéo
Selon Claude Belot (UMP), le gouvernement présentera son projet de loi sur la réorganisation territoriale «lors du conseil des ministres juste avant les vacances». Autant dire que pour la mission pluraliste* qu’il préside au Sénat, il devenait temps de faire connaître des conclusions affinées. C’est chose faite depuis le 17 juin. En attendant la parution du rapport définitif dans le courant de la semaine prochaine et un débat en séance, le 30 juin, gros plan sur les principales préconisations «Belot».

Un conseil régional des exécutifs
Les sénateurs prônent un «conseil régional des exécutifs pour retenir les orientations et faciliter les arbitrages nécessaires à la conduite des politiques territoriales». Ses membres : les présidents du conseil régional (qui présidera ce conseil), des conseils généraux, des communautés urbaines, communautés d’agglomération, les maires de villes de plus de 50.000 habitants ainsi qu’un représentant par département des communautés de communes et les patrons d’éventuelles métropoles.
Un énième cercle de dialogue ? «Ce conseil peut être très contraignant pour faire ou empêcher de faire», réplique Claude Belot. «Cela ne coûte rien et n’ajoute pas une couche au millefeuille», argue-t-il aussi.

De cette manière, la mission droite-gauche évacue le sujet qui fâche : la fusion des conseillers généraux et régionaux dans un corps de conseillers territoriaux. Une option défendue, à l’intérieur de l’instance, par certains représentants de l’UMP mais rejetée par un PS majoritaire à l’Assemblée des départements de France (ADF) et à l’Association des régions de France (ARF).
Lors de la discussion parlementaire, Claude Belot soutiendra «les propositions de la mission». En clair : il ne se fera pas le porte-drapeau des conseillers territoriaux.

8 métropoles facultatives
Le comité «Balladur» en suggérait 11 arrêtées par la loi et dotées des compétences intercommunales, départementales et d’une partie des attributions communales. La mission, elle, plaide tout d’abord pour le chiffre de huit.
C'est-à-dire les communautés urbaines de Lyon, Lille, Marseille, Toulouse, Nice, Bordeaux, Nantes et Strasbourg. Un club qui regroupe les «agglomérations de taille européenne », selon Yves Krattinger, l’un des deux co-rapporteurs et président (PS) du conseil général de Haute-Saône. Le volontariat, contrairement à la proposition «Balladur», serait de mise.

Les métropoles, dans la version sénatoriale, ne bénéficient pas non plus des compétences départementales. Elles n’en deviennent pas moins des collectivités de plein exercice. Mais les communes, à rebours là encore du rapport de l’ancien Premier ministre, conservent ce statut.
«Nous souhaitons que les métropoles aient davantage de poids et reprennent les compétences des département » plaide, au nom du groupe UMP du Sénat, Rémy Pointereau, conseiller général du Cher et membre de la mission.

Accent sur la péréquation
Au lendemain de la présentation par la commission des finances de l’Assemblée de sa vision de la réforme de la taxe professionnelle, la mission «Belot» a donné sa vision de l’évolution de la fiscalité locale, se bornant surtout à énoncer de grands principes. «Il faut mettre fin à l’archaïsme et la complexité (dans ce domaine) le système est à bout et place les collectivités dans une situation de grande dépendance», estime Yves Krattinger.
Pourtant rien de très nouveau quand les sénateurs réclament une actualisation des valeurs locatives et la mise en place de procédures régulières de réévaluation. De même lorsqu’ils demandent à l’Etat de ne pas créer de nouveaux dégrèvements et exonérations ou qu’ils réaffirment «la nécessité de préserver l’autonomie fiscale des collectivités territoriales et de leurs groupements».

Ce rapport se rapproche sur certains aspects des préconisations des députés. Par exemple sur la taxe professionnelle, la mission «Belot» demande que le lien fiscal entre les entreprises et les collectivités soit conforté.
Selon elle, l’impôt économique local pourrait être scindé en deux parts :
  • une première, assise sur le foncier, sous condition de l’actualisation des valeurs locatives ci-avant énoncée. Cette part pourrait revenir aux communes et intercommunalités ;
  • une seconde, sur la valeur ajoutée des entreprises qui irait aux départements et régions.
Enfin, sur la péréquation, qui doit selon les sénateurs «devenir un axe fort de la réforme des finances locales». Ils proposent donc de «dégager des ressources pour les dotations de péréquation à partir d’une réforme des dotations forfaitaires corrigées pour une plus grande équité».
Autres propositions à ce sujet :
  • la création d’un véritable fonds national de péréquation alimenté par des ressources «renouvelées», issues de l’adaptation des mécanismes du fonds de solidarité entre les communes de la région Ile-de-France (FSRIF) à l’ensemble du territoire sur une base régionale, de l’écrêtement des établissements dits exceptionnels et d’une cotisation de péréquation de l’impôt économique assis sur le foncier ;
  • conserver et adapter de nouvelles parts de l’impôt économique local l’écrêtement existant sur les établissements exceptionnels au titre de la taxe professionnelle ;
  • réduire le nombre de bénéficiaires des différents mécanismes de péréquation «pour les rendre plus efficaces».

Un Grand Paris «démocratique»
Yves Krattinger le reconnaît bien volontiers : «On a volontairement adopté une ligne qui ne se met pas en travers des travaux engagés.» La Haute assemblée n’entend pas parasiter le dessein présidentiel du Grand Paris, désormais beaucoup plus porté sur les projets que sur le pilotage du cœur de l’agglomération.
Il n’empêche, elle se prononce, au volet Ile-de-France, pour «une gouvernance métropolitaine démocratique sur le périmètre de l’ère urbaine.» Et Philippe Dallier, sénateur-maire (UMP) des Pavillons-sous-Bois, membre de la mission, de crier victoire : «La métropole parisienne ne pourra pas rester à l’écart du grand mouvement de réforme qui se dessine. Un simple syndicat d’études, tel Paris Métropole, ne saurait en aucun cas y répondre et suffire.»

Des intercommunalités renforcées
La mission n’amende guère ici son rapport d’étape du 11 mars dernier. L’élection des délégués communautaires par un «fléchage» lors du scrutin municipal figure bien à son menu. Pour ce faire, le seuil au-dessus duquel s’applique le scrutin de liste est abaissé de 3.500 à 500 habitants. Les communes, qui n’ont pas encore rejoint une intercommunalité, doivent le faire, selon les sénateurs avant fin 2011.
Les commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI) sont réactivées. Les EPCI à fiscalité propre voient leur poids rehaussé, au détriment des maires et, surtout, des représentants de syndicats intercommunaux.

Des chefs de file
Au chapitre compétence, la mission privilégie le concept de chef de file. Son option est fondée sur l’article 72 de la Constitution : «Lorsque l'exercice d'une compétence nécessite le concours de plusieurs collectivités territoriales, la loi peut autoriser l'une d'entre elles ou un de leurs groupements à organiser les modalités de leur action commune.»
Un principe que vient cependant beaucoup atténuer l’interdiction, au même article, de la tutelle d’une collectivité sur une autre… Ce qui n’interdit pas à la mission d’évacuer la suppression de la clause générale de compétence des conseils régionaux et des conseils généraux envisagée par les rapports «Lambert», «Warsmann» et «Balladur».

«Si les collectivités n’avaient pas cette capacité d’initiative, elles ne pourraient pas couvrir le territoire en haut débit, le Quai d’Orsay ne pourrait pas nous appeler à la rescousse pour mener telle ou telle action de coopération décentralisée à l’étranger», fait remarquer Claude Belot.

Leadership régional sur le développement économique
Là où la loi «libertés et responsabilités locales» du 13 août 2004 n’avait pas complètement tranché, la mission se veut claire et nette. La région, selon elle, doit assurer le leadership en ce domaine. Et prendre la tête d’une nouvelle instance de coordination «rassemblant tous les acteurs et notamment toutes les agences de développement économique».
Une démarche qui se traduit, également par la création d’un «portail unique en faveur des aides à la création et au développement des entreprises». Hors de question, cependant, de confier - comme le suggère l’ancien membre (UMP) du comité «Balladur» - la charge de toutes les actions économiques à la région.
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