F. AMARA : « Nous n'allons pas garder 751 zones urbaines sensibles »

Publié le par Association Grand Paris

PRESSE I LES ECHOS I 06/10/09

FADELA AMARA SECRETAIRE D'ETAT CHARGEE DE LA POLITIQUE DE LA VILLE


La politique de la ville aborde un nouveau tournant avec la remise en question du zonage des territoires éligibles. Rendu public la semaine dernière, un rapport parlementaire commandé dénonce une« superposition » des dispositifs qui « rend difficile le pilotage et l'évaluation » des actions en faveur des banlieues. Il y est, notamment, question de supprimer les 751 zones urbaines sensibles (ZUS), de raisonner à l'échelle des communes et non plus des quartiers, par le biais d'un contrat unique passé entre l'Etat et chaque municipalité.
[ 06/10/09  ]

Une vision que ne partage pas totalement Fadela Amara. La secrétaire d'Etat à la Ville est opposée au contrat unique et défend le zonage, même s'il convient d'en revoir certains paramètres pour « concentrer les actions sur les territoires les plus en difficulté ». Pas question, par conséquent, de toucher aux 215 quartiers ultra-prioritaires bénéficiaires du plan Espoir banlieues lancé par le chef de l'Etat en février 2008 et qui, jeudi dernier, a fait l'objet d'un nouveau bilan lors d'une réunion ministérielle à l'Elysée. Plutôt faible au démarrage, l'implication des ministères dans les différents dispositifs de ce plan s'est nettement améliorée, constate Fadela Amara. La secrétaire d'Etat compte y inclure de nouvelles initiatives, comme la création d'académies d'art et le déploiement d'un schéma national de construction d'internats. Autant de projets encore en attente d'arbitrages et qui feront l'objet d'un prochain Conseil interministériel des villes (CIV).

Où en est le programme Espoir banlieues ? Y a-t-il toujoursdes lenteurs ?

Globalement, on avance. Tous les ministères s'impliquent, mais de façon encore inégale. Certains ont très vite réagi. D'autres traînent encore et n'ont même pas rempli les objectifs 2008 du programme triennal que le président de la République leur a demandé de mettre en place dans son discours du 8 février 2008. Il va falloir, par exemple, que le ministère de la Santé accélère la mise en place des ateliers santé et des maisons de santé. Sur les 49 maisons créées, trois seulement sont implantées dans les quartiers prioritaires où la question de l'accès aux soins est essentielle. Le ministère de la Défense devrait aussi faire plus. Sur l'éducation, de l'avis de l'ensemble des élus, cela marche bien. Je pense notamment aux internats d'excellence : 2.900 places ont été labellisées et on en projette 4.000 pour la rentrée 2011. Avec Luc Chatel, nous travaillons sur un schéma national de construction et de réhabilitation des internats d'excellence. Nous projetons une dizaine de créations ou de réhabilitations à partir d'anciennes friches militaires. Le financement n'est pas arbitré mais je souhaiterais qu'il s'inscrive dans le cadre de l'emprunt national.

Et avec le ministère dela Culture. Où en êtes-vous ?

Nous avons beaucoup de projets, surtout depuis l'arrivée de Frédéric Mitterrand au gouvernement. On travaille sur quelque chose d'avant-gardiste. Avec le soutien de Carla Bruni, je souhaiterais que l'on mette en place des académies d'art d'excellence où toutes les disciplines artistiques seraient présentes. On veut faire quelque chose qui soit à la hauteur de ce qu'a fait Malraux pour redonner du sens à la question culturelle, qui participe à la construction de la citoyenneté. Je souhaite que ce projet soit proposé au prochain Conseil interministériel à la ville (CIV).

Que donnent les dispositifs de soutien à l'emploi et à l'insertion professionnelle ?

Sur l'objectif de 45.000 contrats d'autonomie sur trois ans, nous
en étions au 21 septembre à 13.339 contrats signés et à 1.162 sorties positives. J'ai donné des directives très claires pour que le public visé - celui des jeunes exclus de tout dispositif et qui forment le gros des phénomènes de bandes - soit bien pris en compte. Toute une série d'actions vers les quartiers populaires, notamment des jeunes de moins de 26 ans, pour faire reculer le chômage, sera annoncée au prochain CIV. Les dispositifs en faveur de l'emploi doivent être mieux coordonnés et également mieux évalués. Sur cette thématique-là, j'ai demandé que l'on territorialise tous les types de contrats et mesures existants en matière d'emploi et de formation professionnelle.

Où en est-on dans la réformede la géographie prioritairede la politique de la ville ?

Le rapport commandité par le Premier ministre propose la suppression du zonage et de conserver un contrat unique entre l'Etat et la commune. A celle-ci de gérer comme elle l'entend les moyens que l'Etat lui donne. Personnellement, je ne pas pense que le zonage soit en cause. Quant au contrat unique, il a existé par le passé, mais n'a rien résolu car, en cas d'échec, on risque de se retourner vers l'Etat pour lui demander davantage. En fait, il faut concentrer les moyens, comme le président de la République en a acté le principe, et éviter le saupoudrage. Nous n'allons donc pas garder les 751 zones urbaines sensibles. Certains quartiers ne relèvent plus d'actions ultra-prioritaires. Leur nombre définitif n'est pas arbitré mais, sur le principe, il s'agira de concentrer les actions sur les territoires les plus en difficulté. On ne peut pas traiter sur le même plan une ville pauvre qui ne compte que des pauvres et une ville riche qui a des poches de pauvreté. Il faut donc mettre en place de nouveaux critères d'éligibilité et en même temps prévoir une sortie en sifflet des ZUS pour ne pas pénaliser les maires qui ont bien travaillé. Comprenez-moi bien, je défends une vision politique et non pas comptable.

Il serait question de ne retenir que 215 quartiers.Vous confirmez ?

Il n'en est pas question. Les 215 quartiers dont vous parlez concernent les sites les plus difficiles par rapport à une géographie prioritaire qui aujourd'hui se décline en 751 ZUS, 480 contrats de ville CUCS et 2.493 quartiers de la politique de la ville. Ces 215 quartiers me servent de thermomètre pour savoir à chaque CIV si ce que nous mettons en place marche ou non. Il s'agit, à l'avenir, de fixer des grands principes nationaux, déclinés localement. Les contrats avec les villes - les CUCS nouvelle génération -
seront plus souples pour permettre au maire d'y intégrer des problématiques propres à son territoire. Nous prenons le temps de la concertation pour mettre au point ces nouveaux contrats. Il est impératif, à mes yeux, que tous les partenaires soient autour de la table : élus, représentants de l'Etat, chefs d'entreprise. C'est pourquoi la mise en place de ces nouveaux contrats a été repoussée d'un an, au 1erjanvier 2011.

PROPOS RECUEILLIS PAR  JOËL COSSARDEAUX  ET PHILIPPE MOREAU, Les Echos
 Le plan Espoir banlieues en chiffres
Education   :  2.900 places labellisées en internat d'excellence sur un objectif de 4.000 à la rentrée 2011Formation :  6.000 jeunes accueillis dans une des 52 écoles de seconde chance. L'objectif est d'offrir 15.000 places d'ici à 2012 et d'ouvrir une école par région.Emploi   :  13.339 contrats d'autonomie  signés (8.727 en cours) et 1.162 en issue positive sur un objectif de 45.000 contrats en trois ans. 20.000 jeunes bénéficiaires (dont 15.832 bénéficiaires en CDI et CDD de plus de 6 mois) de l'engagement national pour l'emploi  signé par 93 entreprises (dont L'Oréal, Carrefour, Coca-Cola, France Télécom…).

Publié dans Banlieues - Sécurité

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